THRASH METAL : LES 15 OLD-SCHOOL

Il n’aura échappé à personne que le thrash metal est à la mode. Non seulement pléthore de jeunes groupes de qualité s’acharne à porter haut les valeurs du thrash de toujours, allant jusqu’à choisir des noms reflétant leur dévotion (Bonded By Blood, Mercyless Death,…), mais les anciens combattants reviennent également pointer le bout de leur museau ridé, crasseux et buriné, par l’intermédiaire d’albums qui affichent un impact époustouflant (Exodus pour n’en citer qu’un). Tendance passagère ou mouvement de fond ?
Ce qui est sûr, c’est que les anciens fans de thrash, qui ont traversé les eaux tumultueuses des années 90 sans avoir, pour la plupart, perdu cette passion enflammée pour le style, sont les preuves vivantes que la dévotion au thrash est tout sauf frivole et éphémère. Gageons donc que les nouveaux fans, qui sont loin d’être les moins enthousiastes et les moins connaisseurs d’ailleurs, feront en sorte que le thrash metal et ses valeurs éternelles aient encore de belles années devant eux.
À l’instar du Death Metal, nous vous proposons donc nos 15 intemporels du thrash. Le choix ne fut pas plus facile, le débat pas moins passionné, et le résultat pourra ainsi à l’envie être commenté. Nous vous devons préalablement quelques éclaircissements : tout d’abord, la sélection s’arrête au thrash de la première période, le "Burn my Eyes" de Machine Head figurant ici pour incarner une forme de passerelle entre les deux décennies, également parce qu’il est le fruit d’un groupe de gaillards culturellement issus du thrash des années 80. Vous ne trouverez pas non plus des albums atypiques qui dépassent le simple cadre du thrash metal, et qui seront célébrés par ailleurs ("Seven Churches" de Possessed, "Morbid Tales" de Celtic Frost). Ces points étant clarifiés, je vous laisse vous échauffer la nuque et plonger dans la liste proprement dite. Comme toujours, n’hésitez pas à réagir…
Thrash rules…

ANNIHILATOR - Never, Neverland (1990)

Je vous entends déjà crier au blasphème : mais comment ont-ils pu ne pas sélectionner le cultissime premier album "Alice in Hell" ? Tout simplement parce que "Never, Neverland", la deuxième réalisation du groupe canadien et de son maître à penser, le génialissime Jeff Waters, est certainement la plus aboutie.
Dès les premières secondes de "The Fun Palace", Annihilator nous sert des riffs précis et incisifs, tels une lame de scalpel capable d’opérer une fourmi de l’appendicite. La diversité est de mise sur l’ensemble de l’album, le combo nous servant aussi bien des titres furieux comme "Stonewall" ou "Kraft Dinner", que des titres de haute volée technique tels que "Road to Ruin" ou "Sixes and Sevens".
Coburn Pharr, occupant le poste de chanteur sur ce second album (le line-up est en perpétuel changement), nous démontre toute l’étendue de son registre vocal. En parfaite symbiose avec chacune des compositions, sa voix sait se faire tour à tour hargneuse et chaleureuse, agressive et mélodique. Et que dire des soli de virtuose, véloces à souhait, que dire du titre "Phantasmagoria" devenu un classique tant attendu par les fans en concert (au même titre que "Alice in Hell"), sinon que c’est du grand art ? … L’album se termine comme il commence, par une furie nommée “I Am in Command”. La boucle est bouclée.
Avec bientôt 20 ans d’existence au compteur, Annihilator est toujours au top de sa forme et reste un incontournable du thrash. Mes respects, Monsieur Waters.

ANTHRAX - Among the Living (1987)

Le pilier du thrash américain côté Atlantique, après un "Spreading the Disease" prometteur mais encore un peu timide, parvient enfin en cette année 87 à confirmer son potentiel. Alors que ses confrères historiques : Metallica, Slayer et Exodus ont, chacun de leur côté, ajouté leur pierre fondatrice à l’édifice fringant du thrash metal, "Among the Living" inscrit enfin dans le marbre le style Anthrax, désormais bien affirmé.
Il a fallu l’expérience SOD (Speak English Or Die) pour que la bande de Scott Ian puisse délivrer toute la puissance et l’énergie incroyable de leur thrash aux effluves hardcore. S’affichant désormais délibérément comme leader d’une branche du thrash moins obscure et plus attirée par les thématiques politiques et sociétaires, Anthrax trace à présent sa route avec conviction. Recelant les morceaux les plus légendaires du combo new-yorkais, l’album regorge de riffs jouissifs, de mosh-parts déflagrantes, d’accélérations époustouflantes. "Caught in a Mosh", "I Am the Law" ou encore "Indians" ont, à ce niveau, atteint véritablement l’orgie de headbanging, l’album affichant une fraîcheur et une densité remarquables.
Anthrax est à son zénith, parvenant à trouver l’équilibre parfait entre puissance écrasante, rapidité d’exécution, gestion du tempo, et mélodies et refrains accrocheurs en diable. Le groupe construit là sa légende, et les morceaux phares de l’album viennent agrémenter les shows explosifs du quintet new-yorkais, au cours desquels l’explosivité de leur musique trouve une forme d’épanouissement.
Jamais plus le groupe n’atteindra cette explosivité et cette créativité, ce qui fait de "Among the Living" une forme d’album ultime dans ce genre de thrash crossover.

DARK ANGEL - Darkness Descends (1986)

Il y a des albums qui suscitent la polémique. Nombreux sont les aficionados du thrash qui prétendent que Dark Angel est un groupe surestimé usurpant ses titres de noblesse, alors que les autres le portent aux nues et saluent la supériorité musicale du combo californien. Pour les Trublions, cela n’a pas causé de problème, et c’est haut la main que "Darkness Descends" a gagné droit de cité parmi notre sélection … Et quoi de plus normal !
À la manière d’un Ultra Violence, les riffs sont tous plus rapides et violents les uns que les autres, comme pour rappeler qu’à la sortie du disque, le terme "speed metal" n’était pas un vain mot. Oubliées les ballades acoustiques à la Testament ou à la Acid Reign, oubliée la finesse d’un Metallica ou d’un Annihilator … Ici, les décibels dominent sans laisser le moindre répit à l’auditeur.
Ce que l’on reproche le plus souvent à cet album, c’est certainement sa "fausse" linéarité, le fait que les titres essoufflent et fatiguent l’auditeur à force de constamment assaillir ses tympans qui, dès le titre éponyme, sont mis à rude épreuve. Je pense pouvoir affirmer qu’au contraire, c’est justement ce qui fait l’attrait des 7 titres du LP, ce qui le rend si indispensable pour les amateurs de musique extrême. On pourra comparer "Darkness Descends" à un certain "Reign in Blood" et certainement, il est difficile de ne pas y voir des similitudes en termes de violence et d’intensité. Néanmoins, le songwriting est souvent supérieur sur cet album ("Mercyless Death" ou encore "Black Prophecies") et chaque musicien au sommet de son art, Hoglan et Doty en tête, apporte sa pierre à l’édifice.
Un monument du thrash metal. L’essence du thrash metal condensée en 35 minutes de pure rage.

DEATH ANGEL - The Ultra Violence (1987)

Les Californiens d’origine philippine sont, en quelque sorte, l’icône de la seconde génération de thrashers. Élevés au thrash des maîtres, vouant un culte sans limite aux Exodus et autres Metallica, ces jeunes gens très doués prouvent leur dévotion passionnelle au travers de leur premier album.
"The Ultra Violence" est une sorte de plébiscite enflammé du thrash metal, dans lequel Death Angel cherche à épater la galerie. Et si cette démarche empreinte de naïveté mais définitivement attachante peut faire sourire, la qualité du résultat, elle, ne manque pas d’impressionner et d’imposer le respect. La maîtrise technique du groupe, son inspiration infinie (Death Angel est une machine à riffs) et le charisme de son chanteur, finissent par dissiper les derniers doutes : cette jeune génération a bien ce qu’il faut pour occuper le devant d’une scène thrash alors au firmament.
Et à écouter le titre éponyme de plus de dix minutes (incroyable frénésie de riffs, d’accélérations, de breaks, de soli infiniment créatifs), on comprend que la passion prenne ici des proportions dantesques. Ce déchaînement enflammé, qui dépasse l’entendement, a fait frémir l’échine de générations de fans de Thrash Metal, et je mets ma main à couper que le phénomène fera longtemps son effet. C’est pourquoi "The Ultra Violence" fait référence de témoignage historique, confirmant l’impact qu’a pu avoir cet album à sa sortie.
Les Californiens devinrent en effet instantanément (avec Testament) les nouveaux leaders de la Bay Area, incarnant une forme épanouie, technique et soignée du thrash metal éternel.

EXODUS - Bonded by Blood (1985)

Tout bon fan de thrash qui se respecte se doit de connaître ce classique qu’est "Bonded by Blood", premier album de Exodus, l’un des pionniers de la scène thrash made in Bay Area (un certain Kirk Hammet en a d’ailleurs été membre avant de rejoindre ce qui n’était, à l’époque, encore qu’un petit groupe : Metallica).
D’entrée de jeu, Gary Holt (membre fondateur et actuellement seul rescapé de la formation d’origine) et sa bande nous balancent, avec le titre “Bonded by Blood”, un thrash sans concession et où une rythmique solide nous assaille sans nous laisser de répit (quel marteleur ce Tom Hunting ! ).
Que ce soit sur le titre Exodus, sur lequel le regretté Paul Ballof (R.I.P) hurle toute sa rage, ou sur "A Lesson Violence" et son refrain assassin (titres unitaires par excellence, à donner de purs frissons en live), le groupe nous catapulte de purs brûlots mêlant riffs ultra heavy et parties speed comme le morceau "Piranah", sur lequel les deux guitaristes terminent par un duel de toute beauté, sans oublier le meurtrier "No Love", pour finir par un "Strike of the Beast" aussi efficace qu’une manchette de l’Undertaker.
Bien qu’ayant continué par la suite à sortir de bons albums (dont notamment "Fabulous Disaster") avec Steve Souza au chant, c’est avec son dernier opus en date, "The Atrocity Exhibition", et son chanteur providentiel Rob Dukes, que Exodus nous a (enfin) sorti le digne successeur de "Bonded by Blood", pièces maitresses du mouvement atomique Bay Area.

FLOTSAM AND JETSAM - Doomsday for the Deceiver (1986)

Flotsam And Jetsam n’est pas un nom aussi connu que leurs contemporains Exodus, Slayer ou Kreator. Toutefois, il se peut fort que vous ayez entendu parler de ce combo. En effet, le premier bassiste de Flotsam And Jetsam, qui a rejoint plus tard Metallica sur "And Justice for All", n’est autre que Jason Newsteed.
Cependant, ce "Doomsday for the Deceiver" (1986) ne repose pas uniquement sur ses épaules et nous allons voir que cet album est bien le fruit du travail de cinq excellents musiciens. Le style n’est pas forcément très brutal mais rapide et racé, avec un travail à la guitare de tous les instants, issu de la paire Edward Carlson / Michael Gilbert. Il faut signaler aussi qu’en la personne d’Eric A.K., Flotsam And Jetsam dispose d’un chanteur exceptionnel dont le style pas forcément agressif mais puissant, mélodieux et varié avec une grande capacité à monter dans les aigus.
Sur la chanson-titre, un long et épique morceau de 9 minutes, les musiciens font étalage de tout leur talent : intro acoustique, paroles guerrières / heroïc fantasy, refrains entraînants, riffs recherchés, le chant accompagnant magistralement le tout. Avec ce premier album, Flotsam And Jetsam a déjà sorti une perle, un album de thrash metal qui n’est certes pas aussi brutal que "Reign in Blood", moins sauvage que "Tapping the Vein", mais duquel il ressort justement une personnalité propre. On y trouve cette omniprésence du côté mélodique qui manque tant aux groupes de thrash modernes.
Si vous êtes passés à côté de "Doomsday for the Deceiver", ne faites pas deux fois la même erreur et précipitez-vous dessus afin de rattraper le temps perdu.

KREATOR - Pleasure to Kill (1986)

Après un énorme "Endless Pain" sorti en 85 sur le label Noise Records, Kreator revenait un an plus tard avec ce qui peut être qualifié de "monument du thrash". Oui, oui, rien que ça !
En effet, "Pleasure to Kill" place définitivement Kreator parmi les très grands du style. Sorti la même année que "Reign in Blood" de Slayer ou encore "Master of Puppets" de Metallica, l’on peut dire que ça n’a pas été facile pour le groupe de s’imposer avec cet album. Et pourtant, le thrash survitaminé des allemands n’a rien à envier aux monstres d’outre-Atlantique. Mais venons-en à l’essentiel.
L’album démarre sur une intro plutôt gentillette, avec de jolies mélodies, qui laissent pourtant présager le pire. N’oublions pas qu’il s’agit d’un album de Kreator ! Les maîtres du thrash metal bourrin par excellence. Une fois l’introduction passée, l’on se rend compte que la première impression était bien la bonne. Le calme avant la tempête, comme on dit si bien. Premier riff de gratte "in your face" ; la basse, quant à elle, est extrêmement mise en avant et fait trembler les murs, tandis que la batterie s’emballe dans un blast frénétique. À ma première écoute, je me suis dit : mais merde, c’est quoi cette bombe ?! Il est rare d’entendre du thrash qui dégage autant d’intensité. D’autant plus que les vocaux de Petrozza sont extrêmement rugueux, se rapprochant des voix black de l’époque. Bref, ça va vite, c’est violent et ça renifle la haine à plein nez.
Les titres sont tous excellents, même si pour moi un seul se dégage vraiment du lot (je tiens d’ailleurs à préciser qu’il s’agit d’un de mes morceaux cultes, tout style de metal confondu) : j’ai nommé “The Pestilence”. Riffs assassins dignes de faire frémir Kerry King de Slayer, ça blaste en continu avec une intensité redoutable, et Petrozza nous montre toutes ses qualités vocales. Bref, une chanson aux plans monumentaux qui, à elle seule, aurait suffit à faire de cette galette un grand album.
Cependant, comme je l’ai dit, "Pleasure to Kill" n’est pas seulement un grand album. C’est un monument de l’histoire du metal. Une perle rare qui met tous les vrais metalheads d’accord. Attention, galette indispensable dans toute collection !!!

MACHINE HEAD - Burn my Eyes (1994)

En cette année 1994, le thrash metal n’est pas au sommet de sa forme. L’avènement du death metal quelques années auparavant lui a porté un coup sévère, et ce style a quelque peu été ringardisé par Morbid Angel, Pestilence et consorts. Mais le death metal aussi subit en cette période le retour de balancier de son succès, et la profusion de groupes (dont certains de qualité moyenne) commence à lasser l’auditeur.
C’est alors que débarque Machine Head et son "Burn my Eyes", qui scotcha beaucoup de monde au mur cette année-là (comme dirait Claude François…). En effet, "Burn my Eyes" lorgne d’avantage vers ce que l’on pourrait appeler du power thrash. Dans tous les cas, il s’est entouré de musiciens chevronnés pour cette aventure : Adam Bunce à la basse, Logan Madder à la guitare et le puissant Chris Kontos à la batterie. On rajoute Colin Richardson à la production et on obtient une bombe. En effet, le son est gigantesque et dépasse tout ce qui avait été fait en la matière jusqu’ici, dans la veine d’un "Far Beyond Driven" de Pantera (pas que pour le son d’ailleurs) surboosté.
Côté musique, Machine Head frappe très fort et l’efficacité des riffs, couplée aux parties vocales surpuissantes de Rob Flynn, est un régal. Puissance est bien le maître mot ici, les riffs sont d’une lourdeur sans précédent ("Davidian") et Chris Kontos sait jouer à merveille de sa double pédale : il n’y a qu’à écouter les parties finales de "None But My Own" et surtout celles de "A Nation of Fire" pour s’en rendre compte.
Comme souvent sur les albums qui ont marqué leur temps, l’intensité ne faiblit pas et les morceaux sont suffisamment variés pour ne pas ennuyer leur monde. Avec "Burn my Eyes", Machine Head a fait exploser à la face du monde son thrash "new-school" et les hits que sont "Davidian", "Old" ou "The Rage to Overcome" ont montré la voix à une flopée de groupes qui ont suivi leur voie : Skinlab, Pissing Razors, etc.
Par contre, je ne vais pas rentrer une fois de plus dans la polémique : "est-ce bien du thrash ou pas ?" … Non, je vais juste prendre plaisir à réécouter ce superbe album sans me poser de questions et j’encourage tout le monde à en faire autant, d’ailleurs.

MEGADETH - Rust in Peace (1990)

Brother will kill brother … c’est ainsi que commence "Rust in Peace", et il est vrai que certains (autrefois frères d’armes) deviennent frères ennemis. C’est le cas pour Dave Mustaine, banni par les four horsemen et éternel mouton noir aux yeux du grand public. Pour le moment, le groupe à la mascotte "tête de mort" Vic Rattlehead a du mal à soutenir la comparaison avec Metallica, qui a sorti coup sur coup deux énormes bombes avec "Master of Puppets" et "And Justice for All". Il est temps de frapper un grand coup.
C’est chose faite avec "Rust in Peace" sur lequel les compositions, les soli et les mélodies ont pris ici une ampleur sans précédent par rapport à "So Far, So Good, So What". Rendez vous compte de tous les hits présents ici : "Holy wars… The Punishment Due", le classique par excellence, fabuleux titre dénonçant le fanatisme religieux. "Hangar 18", un titre composé de façon à s’éclater à la guitare avec ces riffs mélodiques ; ses soli sont innombrables dans tous les registres : mélodie, virtuosité, vitesse, et le plus souvent les trois à la fois. Et que dire de "Five Magics", de son intro de basse hypnotisante, de ses guitares qui semblent pleurer et aspirer l’auditeur dans un monde occulte.
Qui n’a jamais fait une virée en bagnole entre metalleux et repris en chœur le refrain, "I Master, Five Magics…" en bougeant la tête comme dans "Wayne’s World" ? Le terrible "Tornado of Souls", lui aussi est parsemé de soli de virtuoses et de rythmiques en béton armé, le tout toujours soutenu par une section basse / batterie efficace et parfaitement équilibrée par rapport aux guitares, ainsi que le chant particulier de Dave et les chœurs très présents. "Rust in Peace… Polaris", encore un titre éternel dans la mémoire des thrasheurs, son intro de batterie reconnaissable entre mille, son refrain inoubliable qui revient quatre fois : "launch the polaris, the end doesn’t scare us, when will this cease, warheads will all rust in peace !", sa fin hystérique, etc, etc. I-nou-bli-able, vous dis-je !
Dave Mustaine tient sa revanche, et même s’il ne connaîtra jamais le succès commercial de Metallica (pas faute d’avoir essayé sur "Risk" notamment), il aura gagné le respect du monde du metal avec ce "Rust in Peace". C’était une époque reculée, où le thrash était encore le roi du monde (plus pour longtemps). Depuis, le death et le black sont passés par là, bouleversant les données, mais je ne saurais que trop vous conseiller de vous repasser cette galette de temps en temps.

Eradication of Earth’s …
Population loves Polaris …

METALLICA - Ride the Lightning (1984)

Certes, le groupe fondé par Hetfield et Ulrich fut le plus prompt à se manifester par l’intermédiaire d’un album de vrai thrash metal dès 1983, affirmant d’ores et déjà sa volonté d’être toujours le premier. Mais la légende prend sa pleine mesure quelques mois plus tard, pour l’éternité.
C’est que le fameux album "Ride the Lightning", avec sa mythique pochette bleutée, affiche des progrès abyssaux, révolutionnant d’ores et déjà ce qu’on appelle encore le speed metal. Le thrash metal prend sa forme moderne et définitive ici, tandis que la concurrence est encore à fourbir ses armes. Metallica est le pionnier, le plus doué, le plus grand, et son album possède un tel éclat et un tel génie, que personne ne pourra plus lui contester son leadership au cours de la décennie.
De l’intro acoustique enchaînant avec un riff d’une puissance jamais entendue sur "Fight Fire with Fire", des compositions à tiroir de "Ride the Lightning", où se mêlent avec brio riffs inspirés, soli enflammés, classicisme et élégance mélodique, jusqu’à la création de la balade thrash épique avec "Fade to Black" et du désormais traditionnel morceau instrumental ("The Call of Ktulu"), Metallica invente tout.
Hormis la prestation un peu pâle de James Hetfield au chant, la maîtrise des compositions et la qualité de l’exécution laissent sans voix. La musique de Metallica incarne une forme de perfection, allant du moindre détail mélodique (issu d’une vraie culture heavy metal) jusqu’au concept global de l’album, incarné par ce modèle à huit morceaux au plan définitif, qui sera repris sur les deux albums suivants.
"Ride the Lightning" ou le vrai départ d’une légende qui va tout dévaster sur son passage pendant des années, au-delà du mouvement thrash metal.

ONSLAUGHT - The Force (1986)

La scène thrash metal anglaise n’a pas nécessairement brillé à chaque occasion. Loin s’en faut. Dans une scène outrageusement dominée par les États-Unis, la Grande-Bretagne n’avait pour elle que quelques prétendants tels, entre autres, Acid Reign, Lawnmower Deth, ou encore Onslaught. C’est surtout ces derniers qui marqueront les esprits.
Comme de nombreux groupes formés au début des 80’s dans la Perfide Albion, l’influence punk est majoritaire et teinte, pour le meilleur et pour le pire, la première sortie discographique maladroite des britanniques : "Power from Hell". Après quelques changements de line-up plutôt originaux (dont l’apparition d’un nouveau chanteur), Onslaught se débarrasse de ses références punkisantes pour embrasser complètement un thrash speed metal de qualité.
Outre les qualités et progrès techniques évidents de "The Force", les compos du groupe prennent en substance, notamment grâce à l’arrivée d’une deuxième guitare : plus longues, changements incessants mais pas rébarbatifs de riffs, des breaks audacieux et puis surtout, un vrai chanteur en la personne de Sy Keeler, qui maîtrise aussi bien sa partie dans les chants plus hargneux que sur des envolées à la Rob Halford, son compatriote. Les lyrics sont très orientées vers le satanisme et ses dérivatifs (il suffit de voir le pentagramme sur la pochette pour s’en convaincre) conférant une petite touche "Hell Awaits" / "Show no Mercy" à l’ensemble.
Mais c’est surtout pour la variété et la richesse des ses tracks (en pagaille, les incontournables "Let There Be Death" ou bien le overkillien "Flame of the Antichrist") qu’à sa sortie, en 1986, l’album accède presque instantanément au statut d’une œuvre maîtresse culte, prouvant que la scène allemande n’est pas seule à vouloir se disputer la couronne des Big Four.

SEPULTURA - Beneath the Remains (1989)

En 1989, lorsque Sepultura nous délivre son troisième album, les temps sont agités. Les géants de l’époque du thrash metal, détenteur du sceptre de la musique extrême, sont loin de se douter qu’ils auront à subir une traversée du désert pendant la majeure partie des 90’s. Depuis deux, trois ans déjà, la scène death metal vient les narguer dans leur carré vert et leur subtiliser nombres de fans. C’est aussi la période où apparaissent de plus en plus de ces combos qui ne savent plus où donner de la tête. Plutôt thrash ou plutôt death ? Ce choix cornélien va malheureusement nuire à la plupart d’entre ceux qui nous pondent tantôt des galettes death thrash, tantôt des galettes thrash death. À ne plus savoir sur quel pied danser, on fait souvent du grand n’importe quoi, ce qui n’est pas pour plaire à un public exigeant.
Sepultura gagne cependant ce pari osé. Mélanger les deux styles avec brio. À vrai dire, aujourd’hui encore les avis sont relativement partagés. Doit-on classer "Beneath the Remains" dans le death metal ou le thrash ? Ces questions n’ont heureusement que peu d’intérêt si ce n’est celui d’ergoter à l’infini. La vraie réponse c’est que "Beneath the Remains" était, est et demeurera un des tous meilleurs albums qui soient. L’ambiguïté est salutaire. "Morbid Visions" et "Schizophrenia", dans une veine plus thrash, préfigurent le succès de "Beneath the Remains". Et si l’on peut sans trop se mouiller arguer que nos amis brésiliens sont plus thrash que death, la production de Burns (Atheist, Obituary ou encore Cynic pour ne citer qu’eux) inverse la donne. À l’époque producteur incontesté de cette scène death metal qui émerge, Burns ajoute cette touche death metal aux titres de Sepultura ; titres qui gagnent en clarté et en profondeur et possèdent cette touche si particulière "à la Burns".
Qui plus est, force est de reconnaître que la voix du sieur Cavalera, à mi-chemin entre thrash et death, finit de nous mettre d’accord. Peu importe les querelles d’experts, Sepultura a pondu un chef-d’œuvre.

SLAYER - Hell Awaits (1985)

On dit souvent du second album de Slayer qu’il est le plus sous-estimé. Il est vrai qu’on lui préfère souvent le jusqu’au-boutisme furieux de "Reign in Blood", les lenteurs angoissantes de "South of Heaven" ou l’accomplissement de "Seasons in the Abyss", qui fait figure de synthèse parfaite.
Pourtant, en sachant combien Slayer a pu jouer ce rôle d’inspirateur pour toute la scène du metal extrême (death et black metal compris), "Hell Awaits" est le disque le plus fondamental du combo californien. Il incarne en fait une sorte de nouveau référentiel métallique en cette année 1985, aux côtés du "Seven Churches" de Possessed, de ce côté-ci de l’océan. "Hell Awaits" présente Slayer sous un visage différent de celui qu’il incarne traditionnellement. Certes, l’album présente toujours cette capacité à jouer vite et fort, avec une agressivité exacerbée, mais son atmosphère très sombre, peut-être la plus délicate à pénétrer de toute son histoire, marque fondamentalement ce disque. Ses constructions plus complexes, limite progressives, sont également à souligner.
Du cultissime "Hell Awaits", celui qui fait les ouvertures de concerts, lente montée cataclysmique vers une furie métallique, en passant par le classique "Necrophiliac" ou le complexe et passionnant "At Dawn They Sleep", "Hell Awaits" est un album multiple, obscur et d’une richesse insoupçonnée. On y trouve des morceaux très atypiques et passionnants comme "Kill Again" ou "Crypts of Eternity", qui, par certains côtés, font figure de géniales inspirations de ce que le metal extrême deviendra quelques années plus tard.
Unique et tellement révélateur du talent foisonnant de Slayer, il serait malvenu de s’arrêter à ses albums les plus médiatiques et d’ignorer "Hell Awaits", sous peine de se priver d’un joyau.

SODOM - Agent Orange (1989)

À une époque où le death metal écrasait le thrash à l’aide de machines de guerre comme Obituary, Morbid Angel ou encore Pestilence, un groupe allemand sortit ce qui est sûrement l’un des plus grands albums de l’histoire du thrash, voire du metal. Il s’agit bien entendu de "Agent Orange" de Sodom, paru en 1989. C’est parti !
Je mets le CD dans la chaîne Hi-Fi, monte le son à fond et appuie sur le bouton play. Et là… pas de fioritures, l’album démarre sur les chapeaux de roue : un bon gros riff thrash qui t’explose les oreilles. Une seule idée me vient : headbanguer. Et première constatation : le groupe ne s’est pas calmé, et il ne fait toujours pas dans la dentelle. C’est rapide, violent et exécuté à merveille. Entre parties où ça poutre sévère et mosh-parts assassins qui te donnent envie de tout casser, on peut dire que le groupe maîtrise plutôt bien l’art (si cher au thrash metal) de faire trembler les murs. L’album est violent du début à la fin, sans pour autant tomber dans la linéarité qui nous donne souvent cette impression si amère de se faire chier.
L’ambiance de l’album et la lourdeur de certain riffs, voire la voix par moment, me donnent une impression plutôt étrange. Il y a quelque chose en plus, ce n’est pas simplement du thrash. Ah, ça y est. Révélation ! Ce petit truc en plus, c’est un putain de gros relent black metal. Certains passages sont vraiment haineux, voire très lourds par moments. Je pense tout particulièrement au titre "Magic Dragon", qui plombe réellement l’ambiance de par sa lourdeur et le timbre spécial utilisé par Tom Angel Ripper, bassiste et chanteur du groupe.
Tous les titres sont énormes, tous m’ont fait headbanguer. Mais à vrai dire, un morceau sort du lot. J’ai bien sûr nommé "Tired & Red". Ce titre démarre très fort. Un gros blast avec un bon gros riff : jusque-là, rien de spécial. Mais ensuite, venu de nulle part, un passage acoustique du plus bel effet fait son entrée. Ce passage me laisse comme nostalgique de par sa tristesse et sa mélancolie. Un passage qui ne laisse personne indifférent, et Sodom signe là un véritable chef-d’œuvre du thrash metal.
Bref, vous l’aurez compris, un album culte, alliant thrash pur et dur et passages black rappelant certains Sarcofago ou Vulcano. Sodom, en cette année 1989, a marqué le monde du metal, prouvant qu’en pleine ascension death, le thrash n’était pas mort. Un album que tout metalhead se doit de posséder, sous peine de passer à coté de sensations uniques.

VIO-LENCE - Eternal Nightmare (1988)

Certaines icônes finissent par passer à la trappe. Invariablement. Encensé, que dis-je, adulé à sa sortie, "Eternal Nightmare" aujourd’hui ne rappelle plus que de bons souvenirs à ceux qui l’ont pratiqué. Difficile à encaisser pour les fans de la première heure de s’apercevoir qu’un disque peut finalement avoir son Alpha et son Omega, et que rien n’est éternel (sauf le cauchemar, hi hi).
C’est donc avec un plaisir non déguisé que les défenseurs du bon goût que nous sommes vous rappellent au bon souvenir de Vio-lence et de son premier album, "Eternal Nightmare". C’est l’album qui, certainement, résume le mieux toute la scène thrash metal. Présomptueux ? Voyez par vous-même.
Vio-lence délivre "Eternal Nightmare" comme une leçon d’histoire. Les guitaristes Phil Demmel et Robb Flynn (transfuge de Forbidden et futur Machine Head) nous donnent une démonstration d’abattage de riffs ("Serial Killer", "Calling in the Coroner") comme seuls Dark Angel ou Death Angel ont su en procurer sur, respectivement, "Darkness Descends" ou "The Ultra-Violence". La basse, incroyablement audible grâce à une production sans failles, rappelle Dan Lilker et ses pérégrinations dans Nuclear Assault. Le chant de Sean Killian est une combinaison réussie de rauque-attitude à la Baloff (Exodus), le charisme de Osegueda (Death Angel) en plus. Ajoutez à cela des chœurs qui tantôt tiennent de Testament, tantôt d’Anthrax. Il serait néanmoins malvenu de considérer la simple et seule somme de ces talents et similitudes. Vio-lence n’est pas un cover band et trace sa voie seul.
En accouchant de "Eternal Nightmare" en 1988, ils occultèrent une bonne partie de la production d’alors, tous les regards se braquant sur le nouveau phénomène de la Bay Area. "Eternal Nightmare" se déguste toujours avec cette fraicheur intense comme un tic-tac.
Amis thrashers d’antan, dépoussiérez votre vieille collection de vinyles, amis thrashers d’aujourd’hui, ne vous privez pas de ce petit joyau.

Article réalisé par BeerGrinder, Eulmatt, Mamafucker, Poupoune & Vastaire (initialement publié le 19 Avril 2008)

2 commentaires:

Unknown a dit…

Très bonne sélection de mises en bouche!

Petit clin d'oeil au new-school Machine Head qui, dans une sélection censée être old-school, m'a parut assez amusante.

Très bonne continuation à vous tous.

Da_Sway

Anonyme a dit…

et Destruction?????????????????????